"Natiobani : au moins 30 terroristes abattus dans embuscade". Cette citation publiée sur Facebook le lundi 21 mars 2022, reste à ce jour non confirmée voire douteuse.

Le lundi 21 mars 2022 à 12H38, Mouhoun afferage, une page Facebook qui compte 9059 abonnés a annoncé le bilan d’une embuscade qu’auraient tendue par les forces armées du Burkina Faso à un groupe de terroristes à Natiobani. Extrait : "Natiobani : au moins 30 terroristes abattus dans embuscade".

Le contexte

Cette déclaration survient dans un contexte de violences et d’insécurité généralisée. Le Burkina Faso est le théâtre de fréquentes attaques djihadistes depuis 2015. Le pays a subi 06 attaques en 10 jours dans ses parties Nord et Est ce mois de mars. Le bilan de ces attaques s’élève à 23 civils et 25 militaires (gendarmes et soldats) tués. Natiaboani, une commune rurale située à une soixantaine de kilomètres au sud de Fada N'Gourma, chef-lieu de la région de l'Est du Burkina Faso, est elle régulièrement visé par ces attaques de groupes armées depuis 2018.

Ces violences font leur retour au Burkina, deux mois après le coup d'État du 24 janvier qui a chassé du pouvoir Roch Marc Christian Kaboré, élu Président en 2015 et réélu en 2020 pour un second mandat.

L’incapacité de l’Etat burkinabé à bouter hors de ses frontières, les groupes armés terroristes a fini par agacer les populations, notamment les internautes. Tous les bilans fournis par le gouvernement aidé dans sa tâche par l’Etat-major général de l’Armée burkinabé, sont sujets à polémiques et à interprétations, le tout dans une ambiance de rumeurs et d’intox.

Certains internautes persuadés que l’Etat burkinabé ne donne pas toutes les informations sur le théâtre des opérations, prennent sur eux de livrer certaines données concernant les affrontements entre les jihadistes et les forces de défense et de sécurité. La publication de Mouhoun afferage va dans ce sens. Elle a suscité quelques réactions (voir ci-dessous).

.

Ce sont plutôt 13 militaires burkinabè qui ont été tués par les terroristes

Le lundi 21 mars 2022 à 18H56, nous avons contacté l’administrateur de la page Mouhoun afferage pour connaître la source de sa publication. Il a déclaré que Charles Wendpouire Sawadogo était celui qui a donné cette information.

Se présentant comme un lanceur d’alerte dans le domaine de la sécurité, Charles Wendpouire Sawadogo est suivi par 88.000 personnes sur sa page Facebook. Contacté le même jour à 19H56 pour en savoir un peu plus sur cette publication qui fait mention de 30 terroristes abattus par l’armée burkinabé, Wendpouire Sawadogo s’est résolu après moult réticences, à nous donner sa source : "Pour vous répondre exactement : l'information vient du terrain", a-t-il indiqué. A la question de savoir qu’est-ce qu’il entendait par terrain ? "Ceux qui étaient sur le terrain", a-t-il ajouté avant de nous ramener à l’Etat-major : "Pourquoi n'avez-vous pas demandé à l'état-major le chiffre exact de son communiqué ?".

Le communiqué en date du 21 mars 2022 de l’Etat-major général de l’armée burkinabé, relatif à une attaque que celle-ci aurait subie de la part des GAT (groupes armés terroristes) évoque plutôt 13 morts dans ses rangs, restant silencieux sur le bilan côté GAT. Nous avons contacté l’Etat-major des armées burkinabè par mail le mardi 22 mars 2022 à 16H48. Au moment de la publication de cet article, l’Etat-major général n’avait pas réagi.

Nous avons aussi joint Gustave Nombré, plus connu sous le pseudonyme "Gugu Champi", blogueur et web activiste burkinabé, sur Twitter pour en savoir un peu plus sur cette publication. "Hier (dimanche 20 mars NDLR) on a perdu 13 militaires dans ce village, mais 30 terroristes qu'on aurait tués, je n'ai aucune Info là-dessus pour le moment", a indiqué le web activiste se référant au communiqué des militaires.

Egalement joint via la messagerie directe de Twitter, Bassératou Kindo, journaliste et blogueuse, ex-présidente de l’Association des blogueurs du Burkina (ABB) n’en dit pas plus :"Je n'ai pas d'informations sur ça", a-t-elle soutenu.A la question de savoir si aucune information allant dans le sens de cette publication, n'avait pas été donnée par l’État-major général de l'armée du Burkina, Bassératou Kindo est formelle. "Je ne pense pas. En tout cas je n’ai pas vu", a-t-elle clairement souligné.

Le verdict

Aucun bilan officiel n’est disponible sur le nombre de terroristes qui auraient été abattus par les Forces de défense et de sécurité le dimanche 20 mars à Natiaboni. Les sources sont formelles. Ce sont plutôt 13 soldats burkinabè qui ont été tués ce jour-là dans ladite localité en à croire le communiqué officiel de l’Armée burkinabè rendant compte des évènements de Natiaboni.